Quand on cherche une voiture d’occasion, difficile d’échapper à la question de la distribution. Ce système mécanique synchronise le vilebrequin et les arbres à cames, et son état détermine la fiabilité du moteur autant que le budget entretien des prochaines années. Courroie ou chaîne, ces deux technologies imposent des contraintes financières et des risques différents.
La courroie transmet la rotation du vilebrequin aux arbres à cames par un système denté. Sa structure combine des fibres de verre dans un élastomère EPDM résistant jusqu’à 140 °C. Cette conception légère réduit les frottements et améliore le rendement, abaissant la consommation de 0,1 litre aux 100 km par rapport à une chaîne. Mais l’élastomère vieillit : chaleur, flexions répétées et hydrocarbures dégradent ses propriétés. Les craquelures apparaissent, le tissu se détache, les fibres se rompent sans signe apparent. Les constructeurs prévoient des remplacements entre 60 000 et 240 000 km selon le modèle, avec une limite temporelle de 5 à 10 ans.
La chaîne, constituée de maillons métalliques articulés, baigne dans l’huile moteur et assure théoriquement une durée de vie équivalente à celle du véhicule. Son architecture à rouleaux encaisse des contraintes thermiques supérieures, avec des températures d’huile atteignant 120 °C. Contrairement à la courroie silencieuse, la chaîne produit un cliquetis au démarrage à froid. L’usure progressive reste invisible : les axes et douilles s’allongent, déréglant le calage, les dents des pignons se creusent. Au-delà de 200 000 km ou avec des vidanges espacées, une chaîne peut sauter d’une dent voire se rompre, avec des dégâts équivalents à ceux d’une courroie cassée.
Le site chaine-courroie.com centralise les données constructeurs de milliers de motorisations. On sélectionne la marque, le modèle, puis la motorisation via le code moteur (section D.2 de la carte grise). La base affiche le type de distribution, l’intervalle de remplacement préconisé, plus les composants associés comme la pompe à eau. Cette vérification prend moins de deux minutes : un 1,2 PureTech à 100 000 km sans courroie remplacée signale un surcoût immédiat de 800 à 1 000 euros.
Le carnet d’entretien trace l’historique de maintenance. Trois éléments comptent : facture détaillée du remplacement, référence du kit monté (distribution complète avec galets, pompe à eau), respect des préconisations. Un carnet vierge sur un véhicule dépassant 120 000 km impose la prudence maximale. Côté chaînes, vérifier la régularité des vidanges (idéalement tous les 10 000-15 000 km avec huile synthétique). L’absence de traçabilité sur 180 000 km laisse planer un doute sur la lubrification, facteur critique d’usure prématurée.
L’audition révèle des indices précieux. Démarrer moteur complètement froid, clé insérée, aucun accessoire activé. Une chaîne génère un bruit métallique sec d’une à deux secondes, causé par la montée en pression d’huile dans le tendeur. La persistance au-delà de cinq secondes indique un allongement ou un tendeur grippé. Un bruit de ferraille continu trahit une usure critique. Côté courroies, un sifflement aigu ou un grincement signale un galet dont le roulement se grippe. Une courroie détendue produit un claquement sourd à chaque accélération.
L’essai routier prolongé (minimum 30 minutes) expose les symptômes. Au ralenti moteur chaud, poser la main sur le volant et percevoir toute vibration anormale. Une distribution décalée déphase l’ouverture des soupapes, perturbant la combustion. À l’accélération franche, une perte de puissance marquée entre 2 000 et 3 000 tr/min suggère un calage incorrect. Observer le tableau de bord : voyant moteur orange combiné à un mode dégradé impose un diagnostic OBD immédiat.
Un remplacement préventif respectant les intervalles constructeur (100 000 km) s’effectue dans des conditions optimales. Le kit complet coûte 150 à 400 euros selon marque et cylindrée. La main-œuvre facturée 60 à 90 euros/heure représente 240 à 540 euros. Coût préventif total : 600 à 1 200 euros.
Une rupture survenant en roulage cumule les surcoûts : dépannage remorquage (150-250 euros), diagnostic avec dépose culasse (500-800 euros), remplacement pièces endommagées (1 500-3 000 euros), immobilisation prolongée, location véhicule (300-600 euros). Coût curatif total : 3 000 à 6 000 euros minimum. Le rapport préventif/curatif atteint 1 à 5, justifiant l’anticipation.
Sur les moteurs à interférence (majorité des diesels et essence modernes), la rupture provoque des dégâts : queues de soupapes tordues, cuvettes de pistons éclatées, culasse fissurée. La facture oscille entre 3 000 et 6 000 euros, dépassant souvent la valeur du véhicule d’occasion.
La facture authentique comporte des éléments discriminants : en-tête complet du garage (nom, adresse, SIRET), date d’intervention, kilométrage exact, immatriculation concordant avec la carte grise. Le détail des pièces montées constitue le cœur : référence du kit de distribution (marque constructeur origine ou équipementier réputé type Gates, ContiTech), inclusion systématique des galets et pompe à eau. Une facture mentionnant uniquement « remplacement courroie » sans précision des galets signale une intervention incomplète vouée à défaillance rapide.
Un véhicule sans carnet ou avec des lacunes impose une évaluation du risque. Sur un modèle 2015 affichant 140 000 km sans preuve, budgéter le remplacement préventif immédiat (800-1 200 euros) à déduire du prix d’achat négocié. Ajouter une marge de sécurité de 500 euros pour traiter d’éventuels dégâts. Sur un véhicule coté 8 000 euros sans preuve distribution, proposer 6 500 euros. Si le vendeur refuse toute négociation, renoncer : le surcoût latent représente 15-20% de la valeur.